Le streetwear, la culture vestimentaire urbaine
Le style streetwear est incontournable dans la mode d’aujourd’hui. Depuis les années 80, une réelle révolution a propulsé ce style en haut de l’échelle de la mode.
Retraçons ensemble l’histoire de ce flow.
Définition du streetwear
Le streetwear, littéralement "vêtements de la rue", représente un style vestimentaire à la fois décontracté et tendance. Le mouvement de mode a émergé dans les années 1980 et 1990, sous l’influence des cultures émergentes de l'époque telles que le hip-hop, le graffiti, le skate et le surf. Ces groupes culturels revendiquent un style confortable et décontracté de la tête aux pieds : pantalons larges, ensemble sportswear, baskets, t-shirts XXL avec une casquette et des bijoux éclatants… qui est aussi l’affirmation publique d’un style de vie et de toute une philosophie.
Origines et évolutions
L’histoire des sneakers a débuté au 19ème siècle, bien avant le streetwear. De simples chaussures de sport sont devenues icônes de la mode.
Les premières baskets modernes sont nées avec la création de la Plimsoll au Royaume-Uni dans les années 1830. Ces chaussures en toile avec une semelle en caoutchouc étaient principalement utilisées pour jouer au croquet et au tennis.
La Converse Chuck Taylor All Star a été produite en 1917 comme chaussure de basket-ball, avec une semelle en caoutchouc vulcanisé. Elle devient vite emblématique dans le monde du sport et au-delà. Les baskets sont devenues populaires parmi les jeunes grâce à des icônes de la culture pop comme James Dean, qui a porté des Converse dans le film Rebel Without a Cause en 1955.
Pour les vêtements, tout a commencé dans les années 80 sur la côte californienne avec Shawn Stüssy, le père du streetwear. Il vendait des planches de surf signées avec son nom puis a décidé de commercialiser des t-shirts avec cette même signature. Stüssy existe toujours et fait partie des marques streetwear les plus reconnues.
Dans les années 90, le streetwear se popularise avec le hip-hop. La machine est lancée avec la vente d’articles dans des boutiques de skateboards. La grande marque de skate, Supreme, en 1994, ou A Bathing Ape, célèbre marque japonaise, rejoignent rapidement Stüssy dans le groupe originel des pionniers.
Le designer Dapper Dan, autodidacte dans la mode, a également joué un rôle important puisqu'il a créé des styles pour différents artistes de hip-hop dans les années 1980 mais aussi des sportifs comme Mike Tyson. Dapper Dan, à l’arrière de sa boutique, copiait Vuitton, Fendi ou encore Gucci en utilisant des rouleaux de tissus siglés. Sa marque de fabrique, était d’africaniser les sigles du luxe : motifs, tissus, extravagance colorée… intégraient ainsi la mode urbaine. Initialement boudé par les grandes marques de luxe, qui l’accusaient de pratiquer la contre-façon et de casser ainsi les prix, (ses créations sur-mesure reprenaient le vocabulaire des grandes marques, sans en imiter les prix effarants), il a finalement été associé aux créations de grandes marques, dont Gucci.
Pour en savoir plus sur Dapper Dan
Les années 2000 ouvrent l’ère grand public du streetwear, notamment grâce à l’influence de l’industrie musicale. Les fans veulent s’habiller comme leurs rappeu.r.se.s et sporti.f.ve.s préféré.e.s, copient, s’inspirent et deviennent ainsi la cible d’un nouveau marché. Ironie du capitalisme, ce qui était initialement une affirmation contre-culturelle devient ainsi mainstream...
Aujourd’hui le streetwear évolue avec son temps et s’adapte aux différentes tendances. On ne compte plus le nombre de marques qui ont émergé sur le marché du textile et su trouver leur place. Le streetwear japonais se démarque au fur et à mesure des années en modifiant le design des habits et en s'adaptant plus étroitement à la culture nippone par des motifs et des références visuelles. Cette spécialisation attire d’autant plus les foules dans le monde entier, fascinées par le vocabulaire visuel du Pays du Soleil Levant.
Les marques iconiques
Supreme, Off-White, Bape (A Bathing Ape), Stüssy, Vetements… Toutes ces marques ont contribué au streetwear.
Les marques de sport telles que Adidas, Nike, Puma, Vans, Converse, New Balance ou encore Obey et Carhartt ont réussi à s’installer aux côtés des marques pionnières et même pour certaines, à devenir des références à part entière en modifiant leurs approches marketing.
Que ce soit en termes de chaussures ou de vêtements, elles se sont toutes imposées aux côtés des plus grands et ont su trouver chacune leur cible. Elles ont pu s’appuyer sur l’aide d’artistes ou de designers pour élever leur notoriété.
Les plus grandes marques ont su trouver leur public et le fidéliser, les consommat.eu.r.ice.s sont devenu.e.s des ambassad.eu.r.ice.s des marques et sont fier.e.s de les porter. Les client.e.s les plus fidèles s’habillent ainsi de la tête aux pieds chez la même griffe
Comme dans d’autres champs de la mode, porter une marque cotée est un signe de distinction et d’élégance, notamment s’il s’agit d’une marque de luxe. Une personne portant du Supreme, par exemple, va s’approprier la notoriété de la marque et mettre en avant son pouvoir d’achat élevé. Paradoxalement, l’uniformisation et la normalisation du marché du streetwear n’a pas émoussé sa capacité à singulariser et à identifier des groupes sociaux.
La montée en puissance des drops et des collaborations
Quelle nuance existe-t-il entre drop et collaboration ? Le drop se résume à la sortie d’une pièce ou d’une collection capsule en édition limitée tandis que la collaboration suppose de réunir deux marques ou une personnalité publique et une marque dans un projet de création.
Les drops ont été lancés dans les années 80 et 90 par des marques comme Supreme qui sortait hebdomadairement des articles limités. L’exclusivité et la rareté étaient utilisées comme moyen d’augmenter la demande et cultiver la base fan en faisant le buzz.
Collab Art X Marque
En 2019, une collaboration mélangeant art et streetwear a eu lieu entre Supreme et Jeff Koons. Des planches de skate, des hoodies et une veste ont ainsi été créées.
Collab Artiste X Marque
Dans une collaboration plus discrète que celle de Travis Scott X Nike ou encore celle de Kanye West X Adidas avec les cultissimes Yeezy, Jul offre une nouvelle collection streetwear avec Reebok, après avoir collaboré avec Asics. Inspiré du monde motorsport et de sa propre marque D’or et de Platine, la collection est composée de t-shirts, survêtements, sweats, accessoires et de deux paires de sneakers.
Collab entre marques de streetwear
Les deux entités streetwear se sont alliées pour faire revivre une ancienne paire des années 90.
Influence du Streetwear sur la Haute Couture
Deux mondes opposés ont créé quelque chose d’unique : la Street Couture !
Le streetwear de luxe fait résonner d’un écho nouveau le bon vieux dicton “les opposés s’attirent”. Les marques de luxe ont vite compris que le streetwear était un marché à conquérir. Les personnalités influentes d’aujourd’hui n’étant plus les têtes couronnées et les capitaines d’industrie, mais plutôt des artistes tels que Rihanna, Kanye West ou Beyoncé, les grandes maisons ont dû opérer une adaptation de leur discours marketing pour ne pas rater le coche. Elles ont donc attiré les grands noms de la mode urbaine dans leur giron en créant des lignes spécifiques pour toucher la clientèle haut de gamme du streetwear. Toutes les techniques marketing pour maintenir une aura auprès du grand public et écouler accessoires et produits de beauté (à relativement meilleur marché que les créations signature, qui ne font pas vivre les maisons de couture) sont bonnes à prendre pour la haute couture. Une des méthodes privilégiées est la publicité à travers les célébrités les plus cotées du moment, qui, à chaque apparition publique, voient leur outfit scruté, commenté et copié par le monde entier.
Balenciaga, Givenchy, Gucci… Toutes ces griffes ont réussi à s’imposer dans le monde du streetwear en gardant leur spécificité, en proposant des sneakers, des vêtements de prêt-à-porter et des accessoires mais aussi en incluant des tenues et des tendances streetwear lors de leurs grands défilés. L’intégration à la tête des maisons des créateurs issus de la mode urbaine a joué un rôle majeur dans cette aventure.
Directeur artistique des tournées et clips du rappeur Kanye West à partir de 2011, créateur en 2013 de la marque OFF-WHITE, Virgil Abloh incarne la success story du streetwear, Fort de ses succès en tant que designer, il devient en 2018 le directeur artistique de la maison Louis Vuitton, et noue un partenariat millionnaire avec le groupe LVMH. Abloh exprimait ainsi la mutation du monde de la mode : « La définition du luxe s’est déplacée et ses valeurs aussi. Dans un sens, le luxe est juste devenu plus confortable ». Son décès prématuré en 2021 n’a fait que grandir son aura. En quelques années, et grâce à lui, Vuitton a compris les bénéfices qu’il y avait à tirer d’une association avec l’univers de la musique et de la street. C’est ainsi que Pharrell Williams est devenu en 2023 le Directeur Créatif Homme pour la marque, signifiant une continuité marketing inaugurée en 2018 avec Abloh.
De l’intérieur, des stylistes contribuent aussi à faire bouger les lignes : Olivier Rousteing, nommé directeur artistique chez Balmain en 2011, à l’âge de 25 ans, imprime sa marque rock et street sur la marque depuis plus de dix ans.
Tout cela a provoqué des émules, et donné naissance à de nombreuses collaborations entre maisons de haute couture et marques de streetwear, comme Louis Vuitton x Supreme ou Air Jordan 1 High Dior Trainers .
Le streetwear adopte ainsi le vocabulaire et les méthodes de la Haute Couture : influencer et transformer le banal du vêtement quotidien en ce qu’il y a de plus exclusif pour être vendu au prix fort.
L’influence du streetwear sur les autres modes
Au-delà de s’être immiscé dans le monde de la Haute Couture, le streetwear s’est imposé dans la vie quotidienne. À travers Le look détente s’est progressivement popularisé et normalisé, et a même conquis une partie du monde du travail. A l’exception de certains milieux (la banque, le droit…) qui se sont assouplis dans leurs codes vestimentaires mais restent stricts, le workwear s’est rapproché du streetwear et autorise aujourd’hui les tenues décontractées ; le jean, perçu comme une pièce informelle, se porte désormais comme un basique de bureau. De plus, les sneakers ont été complètement incorporés et banalisés dans la vie d’entreprise. .
L’adoption du Friday Wear / Casual Day, pratique arrivée tout droit des États-Unis dans le milieu des années 90,s’est imposée. Il s’agit d’un vendredi où le dress-code professionnel est allégé pour être troqué contre une tenue plus décontractée..
On peut donc constater à travers nos tenues pour le travail, et nos tenues dans le quotidien de manière générale, qu’une évolution sociétale profonde est en cours, dans laquelle la montée en puissance du streetwear et des valeurs qui y sont associées joue un rôle de catalyseur.
Le streetwear sur les réseaux sociaux
Le monde du streetwear a réussi à créer une réelle communauté : marques, influenceurs mode, comptes spécialisés…
Grâce à Internet, bien avant l’emballement des réseaux sociaux, des passionné.e.s discutaient déjà sur les sneakers sur des forums comme NikeTalk
D’après l’étude d’HYPEBEAST sur le marché du streetwear, 96% des consommat.eu.r.ice.s utilisent Instagram pour suivre les tendances. Entre les vidéos et les photos des tenues, ce public donne son avis en direct par les likes et les partages, sanctionnant ou validant tel ou tel modèle mis en ligne par les marques. Aujourd’hui, il est devenu impossible de lancer des produits, des drops et des collabs sans passer par les réseaux sociaux !
Une mode qui tente d’être éthique
Derrière ce succès, se cache néanmoins un impact délétère : l’essor de la fast fashion. Si certaines marques de streetwear tentent d’offrir des produits à prix abordables et de qualité, assortis d’une démarche écologique (matériaux recyclés et durables, petite production, fabrication locale), la plupart des grandes marques misent sur une production à très grande échelle, avec une surproduction assumée et la recherche de profits maximum par le biais de la délocalisation des usines dans les pays à main d’œuvre bon marché. Face aux indignations de plus en plus audibles, des marques comme Nike ou Adidas essayent d’adopter des pratiques plus durables, mais leurs schémas économiques les obligent à maintenir l’utilisation de matériaux peu durables et des pratiques ni très écologiques, ni très éthiques. Il reste un long chemin à parcourir pour chacune d’elles.
La bonne nouvelle ? C’est que de plus en plus de consommat.eu.r.ice.s se dirigent vers la vente de seconde main, grâce aux friperies et revendeurs. Le succès d’un certain site internet mondialement connu témoigne de l’éclosion de ce nouveau mode de consommation. Des salons ou événements comme l’Urban Flea Market, pendant les RUN 2023, attirent les amat.eu.r.ice.s de streetwear à la recherche de la perle rare, qu’elle soit neuve ou déjà portée, et surtout moins chère. Mais cela suffira-t-il pour enrayer la surconsommation ? rien n’est moins sûr…
La fin du streetwear...
… n’est pas pour tout de suite. Parce qu’il correspond à un mode de vie, à une évolution décisive des besoins, à l’expression d’une génération qui refuse le carcan des habits traditionnels, parce qu’il s’adapte à toutes les tendances autant qu’il les crée, le streetwear a encore de beaux jours devant lui ! Le look streetwear reste un pilier de la mode et augure de plusieurs années ou décennies de succès. Les Jeux Olympiques de Paris 2024 ont offert à toutes les marques de streetwear notamment sportives l’occasion de s’afficher sur les outfits des athlètes, de quoi générer un confortable chiffre d’affaires…
Les éléments indispensables d’un style streetwear
Les hauts : t-shirt, sweatshirt, bomber
Les sweatshirts (avec ou sans capuche) sont la pièce à avoir ! Synonyme de décontraction, ils permettent un confort maximal.
Les t-shirts rejoignent les pulls en tant que pièce maîtresse d’un outfit confort. Les t-shirts, souvent imprimés avec des multitudes de motifs possibles permettent de se démarquer et d’affirmer sa personnalité.
Tous les hauts oversize ont gagné du terrain et sont devenus indispensables pour un look androgyne, comme le montre l’exemple des chemises portées de plus en plus évasées par tous les publics. L’oversize est en effet revenu en force ces dernières années. Ce phénomène est sans doute à relier aux évolutions sociales dans la conception et l’expression du genre ainsi qu’à la promotion des vêtements unisex, véritable stratégie commerciale des marques, qui peuvent ainsi produire en plus grande masse sous couvert d’adaptation aux nouvelles attentes des jeunes. Cette tendance permet à chacun.e de s’exprimer quelle que soit sa morphologie.
Les bas : jean, cargo, jogging
Coupe droite, plutôt large, les pantalons ont différents aspects qui se marient parfaitement avec les hauts.
Comment parler de streetwear sans jogging ? C’est la pièce iconique de cette mode mélangeant le décontracté et le sportif.
Les accessoires
Couvres-chefs, bijoux, sacs… De nombreux accessoires sont possibles pour les outfitsstreetwear !
Les sneakers
De simples chaussures de sport à des icônes de la mode, les sneakers sont LES INDISPENSABLES d’un outfit parfait. Formes, couleurs, marques : les choix sont multiples et pour tous les goûts et bourses !
Lexique
Hoodie : Cet anglicisme décrit un pull, c'est-à-dire un haut à manches longues que l'on porte généralement l'hiver, à capuche (hood en anglais). La tête peut ainsi être recouverte et protégée en cas de froid ou de pluie.
Outfit : mot anglais qui signifie "tenue". Il peut être utilisé pour décrire un ensemble de vêtements qui vont bien ensemble. Le mot peut également être utilisé pour décrire les vêtements portés pour une activité spécifique, comme une tenue d'équitation ou de voyage
Oversize : mot qui s’emploie en français dans le domaine de l’habillement et de la mode. Il qualifie un style vestimentaire caractérisé par des vêtements larges, amples, de taille un peu trop grande. Cet adjectif s’applique surtout aux vêtements tels que les t-shirts, les hoodies et les manteaux. En pratique, cela veut dire que le vêtement paraît très grand et donne l’impression que vous portez une, voire deux tailles au-dessus.
Sneakers : Le nom sneakers a pour origine le verbe anglais to sneak signifiant « se déplacer furtivement » et donc silencieusement. Il fait référence au silence des semelles en caoutchouc au sol, contrairement aux chaussures habillées à semelle en cuir dur standard, bruyantes. Des communautés urbaines se sont approprié ce terme pour désigner une paire de chaussures de sport détournée à un usage citadin et quotidien. Dérivées des modèles conçus pour le sport, elles sont appréciées pour leur confort et leur style.
Workwear : vêtements de travail / style pour aller au travail